home news forum careers events suppliers solutions markets expos directories catalogs resources advertise contacts
 
News Page

The news
and
beyond the news
Index of news sources
All Africa Asia/Pacific Europe Latin America Middle East North America
  Topics
  Species
Archives
News archive 1997-2008
 

Phoma du colza : jeu de cache-cache entre le champignon et sa plante hôte 


France
November 23, 2015

Lésions de Phoma lingam sur feuille de Colza évoluant vers des nécroses au centre vide. © Inra, DELHOTAL Patrick

La sélection et l'utilisation de variétés de colza naturellement résistantes au champignon responsable du "phoma du colza", Leptosphaeria maculans, sont largement répandues pour lutter contre cet agent pathogène. De façon inattendue, l’apparition de souches capables de contourner le gène de résistance Rlm7 s’accompagne de la réapparition de souches avirulentes vis-à-vis du gène Rlm3. Des chercheurs de l’Inra Versailles-Grignon ont décrypté ce mécanisme, mettant à jour une interaction négative indirecte entre les deux gènes d’avirulence, AvrLm7 et AvrLm3. Ces travaux, publiés le 23 novembre 2015, dans la revue The New Phytologist, ouvrent la voie à de nouvelles perspectives en matière de lutte génétique durable contre cette maladie.

Aujourd’hui, la lutte contre l’agent responsable de la nécrose du collet des Brassicacées (choux, navet, colza, moutarde, raifort...), Leptosphaeria maculans ou phoma du colza, repose essentiellement sur la sélection et l'utilisation de variétés de colza naturellement résistantes à ce champignon. De telles résistances sont souvent conférées par des gènes majeurs très efficaces, mais qui exercent une forte pression de sélection sur les populations pathogènes, au point où ces résistances peuvent être contournées en quelques saisons culturales. La plante initialement résistante se retrouve ainsi de nouveau sensible à la maladie déclenchée par ces nouvelles souches.

Dès 2004, l’utilisation du gène de résistance Rlm7 chez le colza s’est révélée très efficace pour contrôler la maladie. Cependant, des campagnes récentes d’analyses des populations de L. maculans à l’échelle nationale, ont montré que des souches capables de contourner la résistance Rlm7 apparaissaient progressivement, concernant jusqu’à 19 % des isolats à l’automne 2013. Curieusement, le contournement de Rlm7 s’accompagne dans plus de 98 % des cas, de la résurgence de l’avirulence AvrLm3, jusqu'ici absente des populations européennes de l'agent pathogène.

Un chassé-croisé inattendu puisque, s'il est commun d'observer des mutations vers la perte d'avirulence en cas de pression de sélection, il n'avait jamais été observé de cas de gain d'avirulence dans des populations qui en sont dépourvues. Sur la base de la caractérisation du gène AvrLm3, les chercheurs de l’Inra Versailles-Grignon ont étudié les mécanismes sous-tendant ce phénomène et nous en livrent les premières explications.

AvrLm3/AvrLm7, une interaction négative

Exploitant le fait qu’ils avaient préalablement isolé et caractérisé le gène AvrLm7 de L. maculans, les chercheurs ont introduit ce gène dans une souche qui, ayant perdu la fonctionnalité du gène AvrLm7, présentait un caractère virulent vis-à-vis de Rlm7 mais avirulent vis-à-vis de Rlm3. L’addition d’AvrLm7 non seulement restaure le caractère avirulent vis-à-vis de Rlm7, mais supprime également le caractère avirulent vis-à-vis de Rlm3, suggérant une interaction négative entre les avirulences vis-à-vis de Rlm3 et Rlm7. Ce résultat, couplé à la résurgence systématique du phénotype avirulent vis-à-vis de Rlm3 dans les populations du champignon soumises à la pression de sélection exercée par Rlm7, suggère qu'AvrLm3 est présent dans la majorité des souches de L. maculans, mais que sa fonction d'avirulence est masquée par la présence d’AvrLm7.

AvrLm3, un gène d’avirulence plutôt classique

Les scientifiques ont ensuite isolé et caractérisé AvrLm3, un nouveau gène d’avirulence de L. maculans. Ce gène présente les caractéristiques classiques des gènes d’avirulence de L. maculans : il code pour une petite protéine de 160 acides aminés, AvrLm3, très riche en cystéines (dix résidus cystéine dans la protéine mature) qui lui assurent une structure globulaire et une forte stabilité. Il est fortement exprimé durant les phases précoces de l’infection du colza, ce qui suggère un rôle important, comme la majorité des protéines d’avirulence, dans l’établissement de l’infection (on parle alors d’ « effecteurs »). Comme les autres protéines d’avirulence, AvrLm3 est secrété hors de la cellule fongique, ce qui lui permet d’atteindre sa cible végétale.

AvrLm3/AvrLm7, une interaction négative indirecte

Les scientifiques ont également révélé que la présence d’AvrLm7 ne modifie pas le profil d’expression d’AvrLm3, suggérant que le masquage d'AvrLm3 par AvrLm7 ne serait pas dû à un effet du gène AvrLm7 sur la régulation de l’expression d’AvrLm3. Cette interaction serait plutôt indirecte, faisant intervenir les protéines végétales cibles des protéines d’avirulence, et reposerait alors sur un antagonisme fonctionnel entre les protéines AvrLm7 et AvrLm3 : la présence d'AvrLm7 empêcherait la reconnaissance Rlm3/AvrLm3, et donc la mise en place de la résistance induite par Rlm3. Alternativement, on peut aussi envisager qu'AvrLm7 intervienne plus en aval pour supprimer les réactions de défense induites par la reconnaissance d'AvrLm3 par Rlm3.

Ces travaux dévoilent un mécanisme d’interférence très rarement décrit jusque-là chez les champignons pathogènes. Celui-ci interroge tout d'abord sur la généricité de ce type d'interactions négatives qui pourraient avoir été sous-estimées par manque de compréhension fine des interactions plantes-champignons. Par ailleurs, il ouvre des perspectives originales en matière de gestion durable des résistances Rlm3 et Rlm7 puisque la pression de sélection exercée par Rlm7 régénère l’avirulence vis-à-vis de Rlm3. Dans les situations où Rlm7 serait en cours de contournement, la résistance Rlm3 pourrait être redéployée pour contrôler la maladie. L’alternance des variétés résistantes Rlm3 et Rlm7 permettrait de contre-sélectionner les souches virulentes pour l’une des deux sources de résistance. Il serait aussi possible de cumuler les deux résistances dans une même variété, ce qui rendrait plus difficile le contournement de Rlm7 en présence de Rlm3. Autant de stratégies dont la pertinence est d’ores et déjà en cours d'étude à l’Inra.

Virulence et avirulence chez le colza, une histoire complexe

D’une manière générale, la résistance d’une plante à un agent pathogène donné et la capacité de ce dernier à provoquer une maladie chez cette plante, sont deux paramètres contrôlés par un gène de résistance (R) de la plante et un gène d’avirulence (Avr) de l’agent pathogène. La reconnaissance du produit de ce gène d’avirulence par les plantes hôtes dotées du gène de résistance correspondant induit une cascade de réactions de défense de la plante qui limitent le développement pathogène du champignon dans la plante et protège cette dernière de la maladie.Chez Leptosphaeria maculans, 14 gènes d’avirulence ont été identifiés, sept ont été isolés et caractérisés (AvrLm1, AvrLm2, AvrLm4-7, AvrLm6, AvrLm11, AvrLmJ1 et auquel il convient de rajouter aujourd’hui AvrLm3) dont six (AvrLm1, AvrLm2, AvrLm4-7, AvrLm3, AvrLm6 et AvrLm11) par cette même équipe de l’Inra. Ceci en fait l’un des champignons phytopathogènes les mieux caractérisés pour ces gènes d’avirulence.Les résistances variétales conférées par un seul gène R sont généralement très efficaces, mais peuvent être contournées assez rapidement via l’apparition de souches de Leptosphaeria maculans virulentes, et de nouvelles sources de résistance sont donc continuellement recherchées. À ce jour 11 interactions génétiques Rlm/AvrLm ont été caractérisées.

Référence

A game of hide and seek between avirulence genesAvrLm4-7 and AvrLm3 in Leptosphaeria maculans.Clémence Plissonneau, Guillaume Daverdin, Bénédicte Ollivier, Françoise Blaise, Alexandre Degrave, Isabelle Fudal, Thierry Rouxel and Marie-Hélène Balesdent. The New Phytologist, 23 novembre 2015.



More news from: INRAE (Institut National de la Recherche Agronomique)


Website: https://www.inrae.fr

Published: November 23, 2015

The news item on this page is copyright by the organization where it originated
Fair use notice

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

  Archive of the news section


Copyright @ 1992-2024 SeedQuest - All rights reserved